Le Déni
"Ils sont au pouvoir,
elles sont au service"

Golias Hebdo du 18 au 24 avril 2019 : Sexisme ordinaire à la tête de l’Eglise de France

À quoi sert le sexe d’un prêtre ?

Le tout nouveau président de la conférence des évêques de France a proposé d’approfondir le sens du célibat des prêtres. Puisque le magistère établit un rapport continuel entre le corps des femmes et leur vocation à la maternité, intéressons-nous au corps des hommes pour changer des discours sur le corps des femmes. Existe-t-il un rapport entre le sexe masculin au sens physiologique du terme et la prêtrise ?

Un article d’Agnès de Préville et Sabine Sauret
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Université féministe de l’Assemblée des femmes, octobre 2019 Masculinistes et antiféministes : Qui sont-ils ? Où se cachent-ils? Quels sont leurs réseaux ?



À quoi sert le sexe d'un prêtre ? Comme les relations sexuelles sont condamnées hors mariage et que les prêtres catholiques n’ont pas droit au mariage, le sexe masculin des prêtres semble ne pas être d’une grande utilité. À la question sur la possibilité du mariage des prêtres qui donnerait une utilité directe à leur sexe masculin, Éric de Moulin-Beaufort répond non, puisqu’il affirme qu’il faut « approfondir le sens du célibat ». Dans le contexte des scandales sexuels récemment sortis : abus et viols de religieuses et d’enfants, pratique homosexuelle massive du clergé, sans oublier les femmes et les enfants cachés des prêtres, — cette réponse prête à sourire ou à pleurer. Le président de la conférence des évêques de France n'est pas dans le déni, car il sait que le célibat et la chasteté ne sont pas pratiquées et il en connaît les perversions.

Admettons un moment qu’il croie vraiment que le célibat soit une valeur en soi pour être prêtre. Si c’est le cas, pourquoi cet argument ne serait-il pas valable pour les femmes ? Elles pourraient être prêtres elles aussi, à condition de rester célibataires. Puisqu’elles ne le peuvent pas, comme le martèle Eric de Moulin Beaufort : « Certainement pas demain, peut-être jamais », c’est que le sexe masculin joue un rôle dans le fait d’être prêtre.

Quel est ce rôle puisque le prêtre n’a pas le droit de s’en servir et alors que nous savons que la majorité des prêtres s’en servent quand même ? Éric de Moulin-Beaufort dévoile le fond de sa pensée en revenant au sexe des femmes car l’institution ne parle jamais du corps des hommes. Il ajoute : « Il y a malgré tout une grande différence entre le fait d'être un homme et d'être une femme. La plus grande différence, c'est que le corps de la femme est fait pour accueillir la vie. » L’évêque résume les femmes à leur corps et plus particulièrement à leur utérus. Exit les prépubères, les ménopausées, les célibataires, les stériles, celles qui ne veulent pas d’enfants. Exit les talents, les compétences et les désirs de toutes les femmes. Un seul rôle : être enceinte comme Marie.

Quant au sexe masculin, il sert donc à être prêtre. Grâce à cet attribut et à l’appel sexué de Dieu, l’homme prêtre est capable de consacrer des hosties, de gouverner les catholiques, de développer des discours sublimes, de prêcher la morale et en particulier les vertus du mariage hétérosexuel indissoluble, l’horreur de la contraception et de l’avortement. Il les rend capables de diriger la conduite des humains, tout en cachant leur propre vie sexuelle.

Le sacerdoce requiert donc un pénis. C’est la pensée constante du magistère : « À peine est-il nécessaire de rappeler que dans les êtres humains la différence sexuelle exerce une influence importante, plus profonde que, par exemple, les différences ethniques ; celles-ci n’atteignent pas la personne humaine aussi intimement que la différence des sexes. » Cette idéologie héritée du XIXè siècle et fondée sur la croyance que la différence sexuée détermine tout, sert à justifier la supériorité, celle de la race blanche comme celle du masculin. La personnalité masculine serait déterminée par sa sexuation qui la rend capable des privilèges du sacerdoce, du pouvoir et du savoir. Bien qu’elle soit dépassée, cette idéologie sexiste continue d’être la règle puisqu’elle est inscrite dans le droit canon de l’Église romaine. Relue à cette aune, la raison profonde du célibat des prêtres est probablement et tout simplement la misogynie.